L’épidémie de pneumonie virale qui s’est déclarée en Chine en décembre dernier inquiète. Ce nouveau coronavirus, le Sars-CoV-2, anciennement baptisé 2019-nCoV, a déjà fait à l’heure où nous écrivons ces lignes plus de 2000 morts principalement en Chine, avec une propagation dans plus d’une trentaine de pays (dont la France). Une épidémie – pas encore considérée comme une pandémie – mais déjà vue comme urgence sanitaire mondiale par l’Organisation mondiale de la santé. L’inquiétude pointe également du côté de l’économie. Car les mesures sanitaires prises pour limiter la propagation de la maladie ont une onde de choc mondiale.
Un virus qui vient affaiblir (encore) la croissance chinoise
Après une accumulation de plusieurs cas de pneumonie d’allure virale à la fin du mois de décembre, c’est au début de l’année 2020 (le 7 janvier précisément) que le nouveau coronavirus a été identifié. Rapidement, des mesures spectaculaires sont prises pour limiter l’épidémie. Wuhan et deux autres villes de la province du Hubei sont mises sous quarantaine. Deux hôpitaux sortent de terre en 10 jours pour prendre en charge les malades. Le confinement est exigé dans de nombreuses villes, parfois avec des méthodes qui semblent radicales : on condamne des immeubles entiers dans lesquels se trouvent des personnes infectées, on scelle et on soude les portes d’accès pour empêcher tout le monde de sortir[i]…
Touchant la ville de Wuhan directement, ainsi que la province de Hubei, le coronavirus a des conséquences sur l’économie globale de la Chine. Une économie, déjà, largement touchée depuis quelques mois et qui montre des signes d’essoufflement. L’activité industrielle recule fortement dans une majeure partie de l’Asie, et le dynamisme économique qui caractérisait l’économie de l’empire du Milieu n’est plus : conflits commerciaux, efforts de désendettement, demande intérieure en baisse…
Avec 6,6% de croissance du PIB en 2018, et 6,1% en 2019, la Chine enchaîne les taux de croissance les plus faibles depuis 30 ans… 2020 s’annonce comme une année encore plus difficile, notamment à cause du coronavirus (la progression du PIB devrait passer sous la barre des 6 % en 2020). Il paralyse à la fois l’économie intérieure et les échanges mondiaux.
La question de la « Sino-dépendance » mise en exergue
Quelles sont les conséquences pour l’économie mondiale et pour l’économie française ? Avec un pays au ralenti, obligé de se couper en partie du monde pour des raisons sanitaires, les conséquences sont encore difficiles à évaluer. Mais, déjà, un « cauchemar logistique » des entreprises étrangères installées en Chine est noté. Elles ne peuvent pas toujours maintenir leur activité à cause de sous-traitants à l’arrêt, d’employés en quarantaine, ou encore d’une pléiade de restrictions locales et de stocks de masques insuffisants. Les lignes de production ne tournent pas à plein régime, et les règles nécessaires pour maintenir ou reprendre l’activité varient selon les districts.
L’automobile, avec des constructeurs et des sous-traitants, sans oublier les domaines des semi-conducteurs, des produits chimiques ou de produits métalliques non minéraux sont concernés. Les secteurs du textile, de l’informatique et de l’électronique sont particulièrement exposés aux perturbations.
Faut-il s’attendre à des difficultés d’approvisionnement pour certains produits dans nos magasins ? Oui ! Un blocage prolongé va perturber à moyen et long termes les approvisionnements. Déjà, Apple a annoncé ne pas atteindre lors du premier trimestre de l’année 2020 ses objectifs, pointant notamment du doigt la production d’iPhone lourdement perturbée.
Sommes-nous « Sino-dépendants » ? Selon Joerg Wuttke, président de la Chambre européenne de commerce en Chine, « la situation est un signal d’alarme ». Une situation qui démontre la dépendance excessive à une Chine usine du monde, longtemps jugée « imbattable » pour sa capacité à produire rapidement et en masse.
Nous nous retrouvons dans une situation de dépendance logistique, financière et… politique.
« Les leçons du SRAS, ce virus qui avait frappé l’Asie il y a 17 ans, ne sont ici guère utiles. A l’époque, l’épidémie avait fait vaciller la croissance chinoise, sans trop faire trembler la planète. Mais depuis, le poids de la Chine dans l’économie mondiale a quadruplé » commente dans un édito Lucie Robequain, Rédactrice en chef aux Échos[ii].
Le haut degré d’intégration de l’économie chinoise dans les chaînes d’approvisionnement mondiales inquiète de nombreux économistes. La question de la dépendance à la Chine devra se poser rapidement. Déjà certains envisagent de localiser leur production ailleurs, pour réduire cet assujettissement bien trop fort. En attendant, la Chine tousse, l’économie mondiale s’enrhume.
[i] https://www.nouvelobs.com/coronavirus-de-wuhan/20200213.OBS24826/clement-etudiant-francais-a-wuhan-je-commence-a-perdre-patience-face-au-coronavirus.html
[ii] https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/coronavirus-attention-brouillard-1172557